Après examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) en lien avec l’événement entourant le décès d’un homme survenu le 6 janvier 2020 à Terrebonne, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut que l’analyse de la preuve ne révèle pas la commission d’une infraction criminelle par les policiers du Service de police de la Ville de Terrebonne (SPVT).
L’examen du rapport d’enquête préparé par le BEI a été confié à un procureur aux poursuites criminelles et pénales (procureur). Ce dernier a procédé à un examen complet de la preuve afin d’évaluer si celle-ci révèle la commission d’infractions criminelles. Le procureur a rencontré et informé les proches de la personne décédée des motifs de la décision.
Événement
Le 6 janvier 2020 à 13 h 23, un appel est fait au service 911 du SPVT. La plaignante indique entendre des cris et des bruits de destruction en provenance de l’appartement qui se trouve sous le sien. Elle craint que son voisin soit suicidaire. L’appel est réparti à deux agents du SPVT patrouillant en solo. Un premier agent arrive sur les lieux à 13 h 33; le second arrivera quelques minutes plus tard.
En entrant dans l’immeuble, le premier agent entend des cris. Un locataire de l’immeuble se trouvant dans l’entrée lui pointe le logement d’où proviennent les cris. En se dirigeant vers l’appartement, l’agent entend des bruits de destruction. La porte de l’appartement est entrebâillée. L’agent entre dans le logement et constate qu’un homme est assis au sol, torse nu et ensanglanté.
L’agent s’approche de l’individu en l’interpellant par son nom. Il constate que l’homme est très agité et qu’il y a de la vitre fracassée autour de lui. Il décide de procéder au menottage de l’individu afin d’assurer la sécurité de tous. À ce même moment, l’homme se propulse en direction de l’agent qui réussit à bloquer l’attaque avec ses deux mains et à le maîtriser au sol afin de le menotter.
Le deuxième agent arrive dans le logement au moment où le premier tente de procéder à la mise des menottes. Les deux agents essaient de menotter l’homme qui résiste. Il est agité, il crie et donne de violents coups de pied. Ils réussissent à menotter l’individu. Ce dernier est toujours sur le ventre. Il ne crie plus mais il respire rapidement et continue de bouger ses jambes avec force. Le premier agent tente de maîtriser ses jambes et de les plier vers ses fesses, afin de le contrôler. Les agents placent l’homme sur son côté droit et remarque qu’il ne respire plus. Le premier agent commence les démarches de réanimation alors que son collègue va chercher le défibrillateur dans son véhicule de patrouille.
Les ambulanciers se présentent sur les lieux, continuent les manœuvres de réanimation puisque l’homme n’a plus de pouls. Ils le transportent à l’hôpital où l’on continue la réanimation, mais sans succès; le décès de l’homme est constaté à 15 h 41.
Le rapport d’autopsie conclut que le décès est attribuable à une intoxication au bupropion.
Analyse du DPCP
Dans la présente affaire, le DPCP est d’avis que les conditions énumérées à l’article 25 du Code criminel sont remplies.
Cette disposition accorde une protection à l’agent de la paix qui emploie la force dans le cadre de l’application ou de l’exécution de la loi.
Le paragraphe 25(1) accorde une protection à l’agent de la paix employant la force dans le cadre de l’application ou l’exécution de la loi, pourvu qu’il agisse sur la foi de motifs raisonnables et qu’il utilise seulement la force nécessaire dans les circonstances.
Il peut s’agir, notamment, d’une arrestation légale ou encore de manœuvres visant à désarmer une personne ou à maîtriser une personne en crise, en raison du risque qu’elle représente pour elle-même ou pour autrui.
Le paragraphe 25(3) précise qu’un policier peut, s’il agit sur la foi de motifs raisonnables, utiliser une force susceptible de causer la mort ou des lésions corporelles graves s’il croit que cela est nécessaire afin de se protéger, ou encore de protéger les personnes sous sa protection contre de telles conséquences.
Les policiers, étant agents de la paix, sont donc autorisés à employer une force qui, dans les circonstances, est raisonnable et nécessaire pour exercer leurs fonctions et qui n’est pas excessive.
Les tribunaux ont établi que l’appréciation de la force ne devait toutefois pas être fondée sur une norme de perfection.
En effet, les policiers sont souvent placés dans des situations où ils doivent rapidement prendre des décisions difficiles. Dans ce contexte, on ne peut exiger qu’ils mesurent le degré de force appliquée avec précision.
Dans ce dossier, l’intervention était légale et se fondait principalement sur le devoir imposé aux policiers d’assurer la sécurité des personnes. Considérant le danger imminent auquel ils faisaient face et le défaut d’obtempérer de l’individu, les policiers avaient des motifs raisonnables d’estimer que la force appliquée à l’endroit de l’homme était nécessaire autant pour la protection de l’homme et de leur propre protection. Qui plus est, la force utilisée par les policiers n’était pas de nature à causer des blessures graves ou de causer la mort.
Conséquemment, le DPCP est d’avis que l’emploi de la force par les agents de la paix était justifié en vertu de l’article 25 du Code criminel. L’analyse de la preuve ne révèle pas à son avis la commission d’un acte criminel par les policiers du SPVT impliqués dans cet événement.