Bien qu’elle reconnaisse les réinvestissements du gouvernement Legault dans les services publics, l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) déplore le manque dans le budget du ministre des Finances, Éric Girard, de mesures pour favoriser l’attraction et la rétention du personnel dans un réseau qui a été fragilisé par la pandémie.
« On dirait que le ministre n’a pas eu le mémo à propos de la pénurie de main-d’œuvre qui affecte la société, et plus particulièrement le réseau de la santé et des services sociaux (RSSS). On ne peut pas miser uniquement sur le privé pour colmater les brèches que la pandémie a mises au grand jour. Dans son budget, le ministre Girard semble reconnaître l’importance d’un personnel valorisé et bien traité pour consolider le réseau. Il admet que c’est d’abord en investissant dans le personnel, dont les technicien·ne·s et les professionnel·le·s, et en reconnaissant leur expertise à sa juste valeur que nous pourrons offrir à la population des soins et des services de qualité. Malheureusement, ce 4e budget du gouvernement Legault ne va pas au-delà des mots et rate encore une fois la cible en ne prévoyant aucune nouvelle mesure pour l’attraction et la rétention du personnel », a déploré représentant national de l’APTS pour la région de Lanaudière, Steve Garceau
Alors que l’inflation atteint des sommets, inégalés dans les 40 dernières années, le poids des augmentations salariales octroyées lors de la dernière convention collective fond comme neige au soleil. Dans un contexte où le taux de chômage est très bas malgré la crise, il faudra que le gouvernement Legault s’assure de renforcer le réseau public, seul garant du principe de l’accès universel, et de diminuer ainsi les listes d’attente qui ne cessent de s’allonger dans tous les secteurs.
« Les agences de placement ont vampirisé les ressources du RSSS en offrant des conditions de travail et des salaires plus alléchant·e·s pendant la pandémie. Nous sommes dans un système de vases communicants. Ce que le gouvernement va offrir au secteur privé, il va le piger dans le réseau public. Et c’est la population qui va payer grassement le secteur privé avec ses taxes et ses impôts, alors qu’elle pourrait avoir les mêmes services dans le réseau public sans enrichir une petite élite qui s’en mettra impunément plein les poches », a poursuivi monsieur Garceau.
Éviter de rejouer dans le même mauvais film
L’APTS regrette aussi que le ministre des Finances n’ait pas profité de ce budget pour en finir avec le sous-financement hérité de la période d’austérité des dernières années. Pour éviter toute dérive future et de nouveaux cycles de compressions, l’APTS a suggéré au gouvernement de mettre en place un bouclier budgétaire pour protéger le financement du RSSS.
« S’il est acceptable de restreindre la marge de manœuvre du gouvernement au nom de l’équilibre budgétaire et de la diminution de la dette publique, pourquoi ne pourrait-on pas appliquer le même type de contraintes légales au financement des soins de santé et des services sociaux? Là, on se dirige encore une fois vers une nouvelle réforme du RSSS et on n’a aucune garantie sur son financement futur. Il y a une pénible impression de déjà-vu pour les salarié·e·s » a ajouté monsieur Garceau
Avec un tel mécanisme en place, c’est aujourd’hui 1,5 milliard de dollars en plus qui serait disponible pour améliorer les services à la population. L’intention affichée par le ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, de « refonder » le RSSS gagnerait en crédibilité s’il décidait de se doter d’un réel outil de planification et de pérennisation du financement de la santé et des services sociaux.
Refondation ou privatisation?
Malgré l’absence d’un bouclier budgétaire dans ce budget, il va sans dire que la table est mise pour le projet de refondation du RSSS. Cette nouvelle réforme part malheureusement sur de mauvaises bases. De plus, aucune consultation publique ne semble avoir eu lieu, ce qui aurait pourtant permis d’éviter les erreurs de la réforme Barrette.
« Encore une fois, un gouvernement va tenter réformer le RSSS sans consulter les travailleur·euse·s. Encore une fois, on ne va pas prendre en compte les besoins populationnels. Encore une fois, on va se baser sur une vision managériale – qui provient de compagnies privées – pour tenter de mesurer la performance des soins et des services procurés par nos membres. Le RSSS, ce n’est pas une usine de pâtes et papiers. Nous traitons, soutenons et accompagnons des êtres humains, dont plusieurs sont dans une situation de grande vulnérabilité. Si le ministre Dubé veut réellement améliorer le réseau, il doit écouter les personnes sur le terrain et travailler avec elles. Je lui tends la main, encore une fois », a conclu monsieur Garceau