La députée bloquiste, Monique Pauzé, et une résidente de Repentigny, Josianne Théberge interpellent le ministre fédéral de l’immigration afin qu’il se penche sur les nombreux problèmes en matière d’immigration qui ont été exacerbés par la pandémie et plus spécifiquement le dossier des réunifications familiales.
« Les délais et modes de traitement des demandes de parrainage familial étaient déjà déficients avant la pandémie, déplore Monique Pauzé. La crise actuelle rend cette situation encore plus anxiogène pour les familles qui sont séparées et qui voient les délais de traitement anticipés s’allonger de jour en jour. »
C’est le cas de Josianne Théberge, une Repentignoise en couple avec Kelsis Garcia Oramas depuis maintenant trois ans et demi. Mariés depuis le 18 janvier dernier, le couple savait que le processus de parrainage allait être fastidieux, mais il ne s’attendait pas à ce que la pandémie les empêche de se voir pendant plus de six mois.
« Kelsis me manque terriblement, je mets tant d’énergie pour faire avancer son dossier de parrainage et je suis épuisée, explique Mme Théberge, membre du groupe Spousal Sponsorship Advocates. Je parle à plusieurs personnes dans ma situation, nous sommes tous à bout de souffle. Nous avons l’impression d’être coincés au fond d’une grotte et nous avons beau crier haut et fort, le gouvernement canadien ne nous entend pas. Nous retrouver avec nos conjoints ne devrait pas faire l’objet d’une horrible bataille tant au niveau des délais que de la paperasse. »
« Le délai de traitement d’une demande est normalement de 12 mois, mais il y a quelques jours, j’ai parlé à une femme dont les délais d’attente sont rendus à 25 mois. C’est long 25 mois, s’indigne Josianne Théberge. Une femme que je connais a perdu son bébé à cinq mois de grossesse pendant la pandémie. Elle était loin du père de son enfant et elle est toujours seule dans l’espoir que les frontières ouvrent là bas. Une autre a survécu à un cancer, seule. Découragement, tristesse, anxiété. À travers toutes nos histoires, nos témoignages, le mutisme du ministre Mendicino est insoutenable. »
Le cas de Mme Théberge et M. Garcia Oramas est d’autant plus complexe qu’en mai 2019, la semaine où ils ont célébré leur mariage en famille à Varadero, on apprenait que le Canada rapatriait tout le personnel de leur ambassade de La Havane ainsi que l’ensemble des familles de diplomates. Cette situation a causé de nombreux désagréments et des délais supplémentaires dans le traitement de leur dossier.
Visa de visiteur
Le cas de Mme Théberge n’est pas unique puisqu’il y a 28 cas similaires uniquement au bureau de la députée de Repentigny cette année. Monique Pauzé indique que sa formation politique a déjà présenté au ministre, des solutions à court, moyen et long terme afin d’aider ces familles, dont un ajout à l’article 179 du règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, afin que l’existence d’un dossier de parrainage ne soit plus systématiquement un obstacle à l’obtention d’un visa de visiteur.
« L’existence d’une demande d’application pour parrainage est un argument souvent utilisé par les agents d’immigration pour refuser un visa, ceux-ci arguant qu’ayant le projet de rester à long terme au Canada, le requérant a des chances de ne pas retourner dans son pays d’origine à l’expiration du visa, contrevenant ainsi à l’article 179 b) du règlement. Deux demandes ont déjà été refusées à M. Garcia Oramas à cause de cet article. »
« Il semblerait qu’avec l’appui de Mme Pauzé, notre troisième requête a été acceptée,aujourd’hui précise Josianne Théberge. Pourtant dans mon dossier comme dans les autres, on devrait reconnaître qu’une demande de parrainage est plutôt un incitatif à respecter les règles du visa, aucun requérant ne veut faire achopper sa demande de parrainage. »
Les deux femmes s’entendent également pour dire que les agents d’IRCC doivent cesser de retourner automatiquement les dossiers dès qu’il manque un document, mais qu’ils prennent plutôt le temps de faire une vérification complète du dossier et, si cela s’applique, demandent au requérant de fournir la totalité des documents manquants d’un seul coup.
« Cela permettrait d’éviter l’accumulation de délais inutiles, le retard dans l’ouverture du dossier, la multiplication des allers-retours et le risque de perte de documents, ajoute Mme Pauzé. Il n’est pas rare qu’à travers les allers-retours, certains formulaires deviennent caducs et une bonne partie du dossier doit être recommencée, ce qui allonge les délais et, parfois, les problématiques au niveau des signatures de documents. »
Réinvestissement et informatisation
« Le Bloc Québécois demande un réinvestissement en immigration afin de traiter les arrérages de dossier et améliorer les délais, insiste Monique Pauzé. Il est par ailleurs encore aberrant que certaines formalités prennent autant de temps faute de main-d’œuvre. On peut penser à la simple impression de la carte de résident permanent qui prend jusqu’à 120 jours, et ce, même si les demandeurs sont officiellement reçus.
Le Bloc Québécois propose aussi de procéder à une mise à niveau afin d’informatiser le traitement des demandes.
« Il est inconcevable en 2020 que les dossiers procèdent encore en version papier, ce qui multiplie les risques de perte de documents. Le contexte de la COVID-19 a également mis en lumière les lacunes du traitement papier des dossiers, les agents n’ayant pas pu continuer à traiter les demandes dans le contexte du télétravail », déplore la députée de Repentigny.
« Nous n’avons pas choisi tout ceci, conclu Josianne Théberge. Nous nous sommes rencontrés, nous sommes tombés amoureux et nous faisons tout pour que mon parrainage se fasse dans les règles de l’art. C’est pour cette raison que je suis si indignée du silence du ministre et de voir que le Chemin Roxham est encore aujourd’hui passage V.I.P. pour entrer au Canada. Si mon mari était arrivé des États-Unis , un transport l’aurait déjà amené à l’hôtel où il aurait fait sa quarantaine et il serait avec moi au moment où je vous parle. C’est déplorable. »
Josianne Théberge et Monique Pauzé (si cette dernière n’est plus en isolement) comptent participer à la deuxième manifestation pour la réunification des familles en instance de parrainage le 19 septembre de 13h00 à 15h00 devant les bureaux d’Immigration Canada au 1010 Saint-Antione Ouest à Montréal, tout près du Métro Bonaventure.