Nous sommes à un moment charnière pour entreprendre une relance économique dans cette ère de crise sanitaire. La crise environnementale est aussi bien réelle et dramatique.
Les mesures mises de l’avant pour la crise sanitaire afin d’aider la population et les entreprises font globalement consensus. Cependant, les mesures pour contrer la crise environnementale et climatique ne font même pas l’objet de discussions.
Des décisions questionnables sont prises suite à des consultations publiques tenues dans l’empressement et, circonstance oblige, passées sous le radar alors que tous ont leur attention tournée vers leur santé et leurs finances.
Pendant ce temps, des lobbyistes de l’industrie nucléaire, avides de générer des profits pour leurs actionnaires, font valoir leur point de vue auprès du gouvernement et sans difficulté, obtiennent des audiences avec différents ministres.
La voix des citoyens et citoyennes inquiets-tes, portée par des groupes dédiés à protéger les intérêts de la population n’ont pas cet accès « privilégié ». Ainsi, à une demande de rencontre formulée au cabinet du ministre des Ressources naturelles, ils se sont vu refuser une occasion d’exprimer de vive voix leurs inquiétudes et préoccupations entièrement légitimes.
Un exemple éloquent de ce qui précède, mais surtout des conséquences qui résultent de cet « accès », sont les nombreuses interventions des promoteurs de l’industrie nucléaire qui ont convaincu le ministère des Ressources naturelles du Canada d’annoncer un plan d’action canadien pour le déploiement de petits réacteurs modulaires, une technologie qui, rappelons-le, est récente et n’a pas fait ses preuves.
Nous sommes très inquiets de la volonté clairement manifestée par le gouvernement de soutenir cette filière, et ce, pour plusieurs raisons.
Le principal objectif n’est-il pas de lutter efficacement contre le réchauffement climatique ?
Pourquoi prétendre vouloir le faire et, du même souffle, contribuer – aux nombreuses détériorations causées par les déchets radioactifs?
L’énergie nucléaire n’est ni verte, ni propre, ni rentable, ni sécuritaire, ni respectueuse des Premières Nations. Elle se développe sans débat public, avec le soutien inacceptable du gouvernement qui devrait protéger la population canadienne.
Les petits réacteurs modulaires nucléaires :
- Ne sont pas de l’énergie verte : une étude de l’Université du Sussex échelonnée sur 25 ans, démontre que les pays qui ont tenté de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre à l’aide du nucléaire échouent systématiquement. Dans l’Union européenne, l’énergie nucléaire n’a pas obtenu l’accréditation d’énergie verte.
- Ne sont pas de l’énergie propre : les déchets radioactifs actuels sont entreposés de façon temporaire dans des contenants blindés jusqu’à ce qu’on développe une façon de les isoler de la biosphère pour des centaines de milliers d’années.
Le gouvernement fédéral fait fi de la prolifération des déchets radioactifs de forte intensité, comme le plutonium, alors qu’il n’existe pas encore de plan concret pour gérer ceux que le pays produit déjà, sans parler du transport de ces déchets…
- Ne sont pas rentables : le prix de leur développement est nettement supérieur à celui des énergies renouvelables. Une étude du Canadian Environmental Law Association (CELA) révélait dernièrement que l’énergie provenant de ces petits réacteurs coûterait presque 10 fois plus cher que les énergies renouvelables. C’est donc fiscalement irresponsable que de favoriser le déploiement de ces petits réacteurs en prenant l’argent des contribuables.
- Ne sont pas sécuritaires : il y a des risques réels d’accidents, de réactions en chaîne, de contaminations des nappes phréatiques et de l’eau potable qui doivent être envisagés, une menace directe à l’alimentation en eau potable de centaines de milliers de québécois.
Les déchets générés demeureront des risques pour la santé publique et pour tous les organismes vivants. La protection de la santé publique doit être prioritaire plutôt que celle, moralement inacceptable, de promouvoir cette industrie du nucléaire.
Même l’Agence internationale de l’énergie atomique émet des réserves quant à d’éventuels enjeux de sécurité associée à ces petits réacteurs.
- Ne sont pas respectueux des Premières nations : ces réacteurs seraient déployés dans des collectivités nordiques là où les écosystèmes sont des plus fragiles et importants pour la planète. Plusieurs nations s’y opposent : les Algonquins, les Premières nations de l’Ontario, l’Assemblée des Premières nations par la voix de Perry Bellegarde. Le gouvernement canadien qui prétend faire un virage écologique et être respectueux des Premières nations ne perd-il pas toute crédibilité dans un tel contexte?
- Se développent hors de tout débat public : ces systèmes sont dorénavant exclus de la Loi d’évaluation des impacts (pour ceux qui génèrent moins de 200 MW et c’est la plupart d’entre eux). Ceci signifie que ni le public ni les autochtones ne peuvent contribuer à un nécessaire débat transparent sur cette importante question.
Les élus du Bloc Québécois prennent position sans équivoque contre le fait de prendre l’argent des québécois pour développer une filière nucléaire alors que le fédéral devrait soutenir le recours aux vraies énergies vertes du Québec, d’autant plus que nous avons mis fin au nucléaire en 2012.
Nous invitons les ministres fédéraux à s’interroger sur les besoins réels du Canada : favoriser une consommation responsable d’énergies et développer leur efficacité et favoriser le développement de celles qui sont renouvelables. Le riche potentiel d’emplois dans un développement économique plus régional qui favorisera l’environnement, est possible.
Par Monique Pauzé, députée de Repentigny, porte-parole en matière d’environnement du Bloc Québécois
Au nom des députés-es : Sylvie Bérubé, Sébastien Lemire, Mario Simard, Kristina Michaud, Xavier Barsalou-Duval, Luc Thériault et Gabriel Ste-Marie.